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Chine ou Singapour ?

Dernière mise à jour : 20 nov. 2020


Beaucoup d'entreprises occidentales désireuses d’exporter en Asie se posent la même question : Où installer son hub ? En Chine Continentale, à Hong Kong, à Singapour ? Généralement elles choisissent Singapour. Après quelques années d’expérience dans ces trois régions / pays, je me permets d’affirmer que vendre à Singapour est plus difficile que sur le marché chinois.

  • La plupart des grandes entreprises présentes à Singapour ne sont pas locales. Beaucoup sont des « hubs » d’entreprises américaines, européennes, et japonaises. Elles n’ont ni le pouvoir de décision ni les budgets pour procéder à des achats importants.

  • Il est vrai que Singapour, appelé communément « la Suisse de l’Asie », est très riche. Mais c’est un petit marché. Il y a trop peu de grands comptes locaux, et qui d'ailleurs sont bien plus petits qu'en Chine.

  • Singapour c'est seulement 6 millions de consommateurs.

  • Tout le monde vient à Singapour. Vous êtes certains d’y trouver tous vos concurrents, bonne chance !

  • Ne pensez pas que le milieu des affaires à Singapour est propre, honnête, et éthiquement le plus correct. En voici une illustration :

Prêt pour l’Asie


En janvier 2015 le P-DG d’une PME de 25 personnes, située dans l’Essonne et spécialisée en systèmes de sécurité, nous contacte. Il nous fait part de sa volonté d’exporter en Asie du Sud-Est et en Chine. Situation classique, le PD-G de cette entreprise que nous appellerons K-Secure donne priorité à Singapour. Il estime que la Chine viendra dans un second temps.


Premières visites à Singapour


C’est avec plaisir que j’accepte de réaliser la première phase de recherche de distributeurs à Singapour. Mission accomplie, trois mois après nous avions un choix de cinq distributeurs. Deux d’entre eux avaient la préférence du P-DG de K-Secure. En mai, le P-DG de K-Secure, son associé CTO, et moi-même nous rejoignons à Singapour dans le but est de signer ces deux accords de distribution. Pour faire simple, le voyage se passe très bien et notre client signe des accords avec les deux distributeurs qu’il avait mis en « short-list ».


Un prospect inespéré


Puis début juin, les deux distributeurs nous contactent en même temps. Tous deux ont reçu un RFP de la part de DBS, la plus grande banque du pays. DBS souhaite acquérir une solution de gouvernance des identités, exactement ce que développe K-Secure ! Ca tombe très bien puisque dans 10 jours le CTO, que l’on va appeler Armand, va à Singapour pour former les deux distributeurs. Je l’accompagne et nous rendons visite au Directeur Sécurité de DBS, M. John H. Je devine que ce Monsieur est important car sur sa carte de visite je vois qu'il est au rang de Senior Vice-Président. La visite chez DBS se déroule parfaitement, John H. et son équipe sont très agréablement surpris par les fonctionnalités de la solution K-Secure. A la fin de la journée il nous propose d’aller dîner ensemble dans un petit restaurant japonais situé à quelques pas de leur immeuble.


Vous êtes chez DBS !


Au cours du dîner les discussions techniques continuent. Puis John H. nous avoue qu’il y a deux ans ils ont acheté un produit américain qui n’apporte pas satisfaction. Il veut absolument réaliser un POC (Proof Of Concept) de la solution de K-Secure. Nous sommes contents car dans 99% des cas, si un POC est réussi il est suivi de l’achat.


Néanmoins, le P-DG de K-Secure m’a aussi confié la responsabilité du suivi de ses affaires en Asie avec un budget limité, donc pas question de se précipiter. Je me sens obligé de faire attention aux coûts et aux ressources. A ce titre, je me permets de dire à John H. qu’un POC coûte cher, surtout qu’il veut la présence d’Armand, le CTO. Je lui demande donc de prendre à sa charge tous les frais de déplacement, sachant qu’ils lui seront déduits du montant de l'achat. Il refuse catégoriquement. J’insiste en lui faisant comprendre que nous n’avons aucune garantie d’achat de sa part, pas de contrat, rien ! Il me répond sèchement : « Vous êtes chez DBS et je suis Senior Vice-Président, vous devriez savoir que nous n’avons pas de temps à perdre et qu’il est impoli de douter de nous. Enfin, sachez que si le POC se déroule avec succès, nous achèterons votre solution car nous en avons besoin et n’avons pas de problème de budget ». Et bien au moins c’est clair ! Nous prévoyons le POC pour mi-juillet.


Retour à Singapour pour le POC


Le 22 juillet au matin, Armand et moi arrivons chez DBS pour réaliser le POC. John H. s’empresse de soumettre à Armand un cas très complexe. Personne chez DBS n’a jamais pu résoudre ce cas, ni avec le produit américain ni avec quoi que ce soit. John H. donne deux jours à Armand pour résoudre ce cas, demain soir tout doit être fini. Ce n’est pas un cadeau mais Armand en a vu d’autres. Pas du tout inquiet, il procède à l’installation du produit puis travaille calmement toute la journée avec les gens de John H. Nous sommes dans une grande banque, Armand se doit de leur expliquer tout ce qu’il fait dans les moindre détails. Effectivement, le cas est pourri, il n’y a pas d’autres mots.


Bingo !


En fin de journée Armand est bloqué sur un point, il a besoin des gens de la R&D en France. Nous rentrons à l’hôtel pour permettre à Armand de communiquer avec ses collègues au siège. Le lendemain nous arrivons chez DBS et Armand installe une nouvelle version qu’il a reçu durant la nuit. Elle est censée résoudre le cas tordu de DBS.


Dix minutes après, Bingo ! Non seulement le cas est résolu mais cette nouvelle version apporte une fonction supplémentaire très utile et à laquelle DBS n’avait pas pensé. Nous sommes en fin de matinée du deuxième jour, John H. organise une réunion générale avec présentation des résultats.


POC parfaitement réussi


John H. et ses collègues sont fous de joie, ils trépignent. Sincèrement ils sont comme des enfants devant leurs cadeaux de Noël. Ils sont pas seulement enthousiastes, ils sont complètement hystériques ! Je pause donc la question qui justifie ma présence : " Quand comptez vous acheter ? " John H. répond : " Pas de problème, je demande le déblocage du budget et vous fais un email sous une dizaine de jours ".


Pas de réponse


Dix jours après ne voyant rien venir, je m’inquiète et contacte John H. Ce dernier répond qu’il n’a que 25 K€, soit la moitié du prix initial sur lequel il était pourtant d’accord. Je demande au P-DG de K-Secure ce qu’il en pense. Il me répond qu’il faut gagner cette banque car c’est la première banque du pays et peut-être de la région ASEAN, alors d'accord pour les 25 K€. Je confirme le prix à John H. mais au bout de quelques jours je n’obtiens toujours pas de réponse.


Le choc !


Je relance encore et il me répond : " C’était juste un POC sans obligation d’achat, alors ne me relancer plus car nous n’avons pas l’intention d’acheter votre produit cette année. Recontactez nous éventuellement l’année prochaine ". Je lui rappelle ses propos lors de notre dîner au restaurant japonais… Ainsi que ses propos lors de la réunion qui a clôturé le POC… Mais rien à faire, en plus il me dit qu'il n'est pas engagé.

Je demande des éclaircissements aux deux distributeurs qui me répondent que l’on ne doit pas bousculer DBS car c’est un très grand compte. Evidemment qu’il ne vont pas bousculer DBS car ils ont d’autres affaires en cours chez eux, donc rien à espérer de leur part.


Chine ou Singapour ?


Ce comportement heureusement ne fais pas partie des valeurs de la Chine. En 15 ans j'ai participé à plus d'une cinquantaine de POC et jamais un prospect chinois ne s’est permis une telle plaisanterie. Quand un Chinois décide de procéder à un POC, et que le POC réussi, il passe toujours commande. Nous n’avons jamais eu d’échec !


Après cela, qu’on ne me dise plus que l’export en Asie doit commencer par Singapour pour des raisons d’éthique et d'honnêteté. Certes la Chine est plus difficile à appréhender mais le marché chinois est gigantesque, bien plus grand que tous les autres pays de de l’ASEAN réunis. Et en Chine il n’y a pas de problème de budget !

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